NOUVELLE-ORLÉANS, LA SEULE ET L'UNIQUEAsher regarde à droite, puis il regarde la gauche. Ses parents lui ont toujours dit de regarder des deux côtés de la rue avant de traverser. Il marche tranquillement et s'arrête subitement au milieu de la rue. Il attend patiemment, puis il voit une voiture apparaître. Il ne bouge pas, il ne fait que rester droit comme un piquet. Il l'attend. Son oeil gauche est enflé, il a terriblement mal aux côtes et sous son nez, on retrouve du sang séché. Ash s'est bagarré avec une brute, un gamin qui s'amusait à rire de ses vêtements démodés et ses chaussures trop grandes pour ses pieds. Il en a eu assez. À la cloche, il est sorti à l'extérieur puis s'est caché dans un coin. Quand il a aperçu la brute et ses amis, il s'est jeté dessus. C'est tout ce qu'il se souvient de l'incident. Asher s'est réveillé à l'infirmerie. Il entendît une voix dans le bureau à côté, probablement l'infirmière ou un de ses professeurs qui appelait ses parents. Tout naturellement, il se leva, ouvrit la porte et décida de retourner chez lui. Le voilà sur le chemin du retour, regardant la voiture s'en venir vers lui. Il respire profondément. Il entend soudainement le klaxon de la voiture. Elle roule rapidement, ne désirant surtout pas s'arrêter pour laisser quelqu'un traverser la rue. Elle est tout près de lui à présent, le conducteur appuyant violemment sur le klaxon pour que le garçon se pousse du chemin. Asher ferme les yeux, il serre les poings. Et si tout pouvait finir maintenant? Plus de coups, plus de moqueries, plus de fringues moches, plus de parents chômeurs qui ne peuvent presque pas payer l'éducation de leur fils... La voiture s'arrête brusquement devant lui. Asher ouvre les yeux, le coeur battant à la chamaille. Il entend le conducteur qui crie dans sa voiture, l'insulte en lui faisant des signes de retourner sur le trottoir. Ash baisse la tête puis marche les quelques pas qui lui restaient pour se retrouver sur le trottoir. Il regarde le ciel et inspire profondément. Ce que c'est bon de se sentir vivant...

LES AIGUILLES ET L'OPIUMCela fait plus d'une demi-heure qu'Asher est arrivé chez William Johnson. Ce mec-là n'est pas vraiment quelqu'un qu'Ash apprécie. Il est bruyant, ne dit jamais rien d'intéressant et voit les femmes comme des objets sexuels. Pourquoi est-ce qu'il se retrouve chez lui? C'est seulement parce qu'il organise une fête à tous les vendredis soirs. Asher ne peut pas quand même pas rater une occasion de boire et déconner avec ses amis. Il arrive chez Johnson à 21h, puis se dirige directement vers la cour extérieure. Les gens ont commencé à arriver vers 20h30. La maison est déjà remplie et plusieurs personnes commencent déjà à sortir à l'extérieur pour respirer un peu. Ash rejoint ses amis, qui viennent tout juste de rouler leur joint. Il leur en vole quelques taffes. Il se met à tousser, ses poumons n'ayant que la capacité pulmonaire d'un enfant de cinq ans. On dirait que c'est sa première fois. À chaque vendredi, c'est la même chose. Il se pointe chez Johnson, commence la soirée en fumant de l'herbe puis vide deux ou trois canettes de bière. Ensuite, un de ses amis leur propose d'essayer quelque chose de nouveau. La semaine dernière, c'était de la MDMA, plus connu sous le nom d'ecstasy ou encore Molly. Après avoir essayé la nouvelle substance, il termine la soirée, soit en écoutant du Pink Floyd et en philosophant, soit en se mettant dans un coin en boule, souffrant d'un bad trip qui ne semble plus finir. Son meilleur ami Maximilian rêve grand. Il veut avoir essayé l'héroïne et la coke avant son dix-huitième anniversaire. Son ami idolâtre Jim Morrison ou encore Jimi Hendrix, Asher idolâtre plutôt Jean Cocteau et Miles Davis. Contrairement aux autres, Ash ne se drogue pas pour le plaisir. Il le fait parce qu'il se sent beaucoup mieux après. Il se sent calme, apaisé. Il oublie presque ses parents sont encore en Louisianne alors que lui se trouve en Ohio, à vivre dans le manoir de ses grands-parents. Cela a commencé à tous les vendredis, puis cela s'est transformé à tous les jeudis et vendredis. Puis il s'est retrouvé à fumer de l'herbe quotidiennement et à expérimenter à toutes les fins de semaine. Maintenant, Asher n'expérimente plus. Il se contente de fumer de deux à trois fois par jour, question de garder son esprit éveillé et son sourire contagieux.

RUBY, DON'T TAKE YOUR LOVE TO TOWNElle est partie... À chaque matin, le réveil est difficile. Là où avant, il pouvait trouver la fille qu'il aimait tant en train de dormir paisiblement à ses côtés, il ne trouve qu'un côté de lit vide et froid. Ses draps empeste son parfum. Partout où il regarde, il voit son visage. Asher vit sa première peine d'amour. Elle connaissait tout de lui, il connaissait tout d'elle. Ils parlaient de mariage, ils s'étaient même amusés à choisir des prénoms pour leurs enfants. Ash se souvient encore des premiers mois de leur relation, où ce n'était que sexe et conversations. Il pouvait passer des heures à la regarder, à l'écouter parler, à la faire rire. Ils avaient décidé de vivre ensemble, dans un petit appartement près du campus de l'OSU. Du jour au lendemain, elle est partie. Ce qu'il déteste le plus, c'est qu'il ne saura jamais pourquoi. Asher est en boule dans ses draps, des airs de vielle musique country viennent réchauffer son coeur en miette. Il sait qu'il ne pourra plus jamais la serrer dans ses bras, il ne pourra plus jamais la regarder, l'écouter parler et s'amuser à la faire rire. Un jour, ils déjeunaient ensemble sur leur petite terrasse et l'autre, Ash se trouve à manger seul son petit bol de céréales molles, à regarder les passants dans la rue plus bas. Il fait confiance à la marie-jeanne pour lui remonter le moral, à l'alcool fort pour l'aider à oublier. On remarque une certaine baisse de motivation chez lui. On lui demande d'aller consulter quelqu'un, comme quoi parler à un spécialiste pourrait l'aider. Ash ignore tout le monde. Ses amis, sa famille. Il sait qu'il passera à autre chose, à quelqu'un d'autre. Il sait qu'il finira par l'oublier. Il désire tant l'oublier, mais il en est incapable. Il ne veut pas l'oublier. Il ne veut pas qu'elle devienne un souvenir, bon ou mauvais. Il ne veut pas la détester, il ne veut pas continuer à l'aimer. Elle est partie, c'est fini. Il se plongera maintenant à fond dans ses études, doublera sa consommation d'herbe quotidienne et deviendra un fan dévoué de Kenny Rogers. Il se mentira en jurant qu'il ne s'attachera plus jamais, qu'il se contentera que de brèves liaisons pour satisfaire ses besoins.